
Déclaration du représentant permanent Adjoint du Niger auprès des Nations unies, au débat public virtuel de haut niveau du conseil de sécurité de l’ONU sur la consolidation de la paix et maintien de la paix : Les facteurs contemporains de conflit et d’insécurité.
Monsieur le Président,
Je commence par féliciter Saint-Vincent-et-les-Grenadines pour son accession à la présidence du Conseil de sécurité et d’avoir organisé cet important débat d’aujourd’hui.
Monsieur le Président,
Notre monde est confronté à une myriade de crises, dont beaucoup sont interconnectées. Les nouvelles menaces non conventionnelles qui pèsent sur la sécurité mondiale nous imposent une approche nouvelle qui permet de s’attaquer de manière plus adéquate à ces crises émergentes.
Relever les défis du développement auquel sont confrontés de nombreux pays, est un élément important pour garantir la paix dans le monde. Et l’un des meilleurs moyens d’investir dans la consolidation de la paix est le développement équitable, en particulier dans les États fragiles.
En effet, le dernier rapport sur les « États fragiles » identifie 58 contextes nationaux comme étant fragiles, dont 15 extrêmement fragiles, la plupart étant des États touchés par des conflits et ayant des économies à faible revenu. Si les tendances actuelles persistent, d’ici 2030, 80 % des plus pauvres du monde vivront dans des contextes fragiles, les rendant plus vulnérables à l’insécurité et aux crises. Il s’agira d’un cercle vicieux en ce sens que les crises croisées qui caractérisent les contextes fragiles peuvent également compromettre les progrès durables vers les objectifs de développement durable.
Dans les pays fragiles marqués par les conflits et l’instabilité et, dans certains cas, par une pression démographique accrue, les investissements dans le développement sont particulièrement essentiels. Des études ont établi un lien entre la pauvreté, l’analphabétisme et la radicalisation. Les jeunes qui ne sont pas scolarisés courent un risque beaucoup plus élevé d’être recrutés dans des groupes terroristes armés tels que Boko Haram ; les filles vivant dans des zones touchées par des conflits courent aussi un risque plus élevé de subir des violences sexuelles et sexistes, et elles ont moins de chances de poursuivre leurs études et d’être scolarisées surtout avec la destruction de leurs infrastructures scolaires.
Monsieur le Président,
L’une des menaces les plus graves pour la sécurité auxquelles nous sommes actuellement confrontés est le changement climatique. Outre l’insécurité alimentaire et la dégradation de l’environnement qu’il engendre, le changement climatique a exacerbé les vulnérabilités existantes qui ont des conséquences désastreuses et alimentent les conflits – sapant la croissance économique et les gains de développement des dernières décennies, tout en exacerbant les situations humanitaires.
Dans le bassin du lac Tchad et le Sahel, par exemple, l’interconnexion entre l’insécurité, la pauvreté et le changement climatique est clairement établie. L’Afrique de l’Ouest et le Sahel sont cités comme les exemples édifiants de zone de conflits liés au climat, qui sont des facteurs supplémentaires de migration et de déplacement forcé.
Près de 10 millions de personnes dépendent de l’aide humanitaire dans la région du lac Tchad en raison des conflits armés prolongés de la dernière décennie. Plus de 100 000 personnes sont déplacées dans la seule région de Diffa, au Niger et près de 250 000 réfugiés ayant fui le Nigeria vivent dans les zones frontalières du Cameroun, du Tchad et du Niger et dans d’autres parties du Sahel central.
Les effets croissants du changement climatique sur les écosystèmes exacerbent la précarité des moyens de subsistance des populations de ces zones. C’est pourquoi, le Niger s’efforce de faire en sorte que les risques liés au climat soient pris en compte de manière plus systématique au sein du Conseil et ce avec l’aide de certains membres qui partageant avec lui cette préoccupation.
Une approche intégrée de ces risques et des facteurs de conflit liés au genre, rendrait non seulement nos interventions plus efficaces, mais elle pourrait également contribuer à réduire la recrudescence des crises futures et les graves inégalités entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci.
Monsieur le Président,
Aujourd’hui, la pandémie mondiale du COVID-19 a renforcé l’idée que l’action collective est vitale, que le multilatéralisme est nécessaire et qu’une approche intersectionnelle des problèmes mondiaux émergents est la seule façon de trouver des solutions durables.
La pandémie nous a rappelé qu’aucun pays n’est sûr tant que tout le monde ne l’est pas. Au lendemain de cette crise, nous devons au monde un engagement renouvelé en faveur d’un multilatéralisme véritable et inclusif.
Comme l’a rappelé le Président de la république du Niger lors du débat de haut niveau en septembre, cette pandémie mondiale a mis en évidence l’urgence de repenser notre sécurité collective. Il nous appartient à tous de travailler ensemble pour tirer les leçons nécessaires et réfléchir aux réformes indispensables de nos systèmes de gouvernance mondiale.
Compte tenu de tous les points susmentionnés, ma délégation voudrait faire les recommandations suivantes :
– 1. la nécessité d’aborder la nature intersectionnelle des menaces à la sécurité par une recherche solide qui fournirait des informations et des données clés pour mieux adapter notre travail à ce contexte en évolution.
– 2. combler le déficit de financement des interventions qui permettraient de s’attaquer conjointement aux problèmes de développement dans les zones touchées par les conflits et les contextes fragiles.
– 3. soutenir et renforcer le rôle des organisations régionales – puisque nombre de crises dépassent les frontières nationales.
– 4. placer les personnes au centre et renforcer le rôle et la participation des femmes et des jeunes.
Je vous remercie de votre attention.