
Declaration de madame Aïchatou Kané Boulama, ministre du Plan du Niger à l’évènement de haut niveau du groupe d’amis pour l’élimination des violences a l’égard des femme et des filles par vidéoconférence
Excellence Madame la Présidente de l’Estonie,
Monsieur le Secrétaire General,
Madame la Commissaire chargée des partenariats internationaux,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec un réel plaisir que je prends part à cet évènement de haut niveau consacré a l’élimination des violences faites aux femmes et aux filles, pour vous livrer le message de Son Excellence Monsieur Issoufou Mahamadou, Président de la République du Niger, qui pour des raisons de calendrier n’a malheureusement pas pu se joindre à vous.
A présent, je voudrais vous donner lecture de son message.
Madame la Présidente,
Monsieur le Secrétaire General,
Mesdames et Messieurs,
Si la pandémie de la COVID19 a été une crise à l’échelle mondiale, elle a été particulièrement dévastatrice pour les femmes et les filles. Les conséquences de cette pandémie portent malheureusement un visage féminin : ONU Femmes a enregistré un accroissement croissant de toute sorte de violences à l’égard des femmes et des filles qui sont devenues davantage vulnérables.
Avec la fermeture des écoles, plusieurs milliers de filles risquent de ne jamais reprendre leurs études. Cette question est d’autant plus préoccupante dans les zones de conflit et d’insécurité où les filles ont moins de chance de retourner à l’école, ce qui les rend plus vulnérables aux mariages forcés et aux mariages précoces. Il est, de ce fait, essentiel de travailler de manière intersectorielle afin de prendre en compte, dans nos interventions et politiques publiques, la manière dont ces crises multiples exacerbent les vulnérabilités.
Assurer un accès à l’éducation de qualité, notamment aux filles, demeure une de nos priorités nationales comme en témoigne notre engagement sur la question au Conseil de sécurité où, sous la Présidence du Niger, une Déclaration Présidentielle sur les attaques contre les écoles fut adoptée. Nous nous réjouissons du renforcement des programmes pour l’accès à l’éducation dans le Sahel Central, notamment avec le financement du consortium « Éducation sans délai » pour soutenir les enfants réfugiés ou déplacés internes dans mon pays.
Nous devons protéger l’accès à l’éducation, en particulier pour les filles : c’est, en effet un moyen sûr de pallier les causes profondes des violences basées sur le genre, parmi lesquelles la discrimination sexiste et le manque d’opportunités économiques. L’accès à l’éducation peut contribuer à combattre de façon durable la pauvreté, à remédier aux inégalités entre les sexes, et à donner tout simplement leur dignité aux femmes et aux filles.
Mesdames et Messieurs,
Sur le plan des activités économiques, malgré la contraction due à la COVID19, notre pays a enregistré une croissance économique positive en 2020 grâce notamment à des mesures de confinement ciblées mais également aux réformes structurelles enclenchées durant les dix dernières années. Néanmoins, le secteur informel, composé majoritairement de femmes et de jeunes, a énormément souffert.
Les politiques et programmes post-COVID19 doivent s’appesantir sur comment assurer une protection sociale accrue au secteur informel. Ceci permettra de protéger les femmes africaines de la précarité économique à laquelle les exposent les chocs multiples.
Dans les pays fragiles, touchés par l’incidence multiple des changements climatiques et des crises sécuritaires, il est essentiel de renforcer le filet social d’autant plus que pour la première fois en vingt ans, la Banque Mondiale prévoit, cette année, une augmentation du nombre de personnes vivant sous le seuil de la pauvreté à l’échelle mondiale. Rappelons que, malgré les difficultés auxquels fait face le Niger, le taux d’incidence de la pauvreté a été réduit de 48% a 40% et les indicateurs en termes de développement humain pour la mortalité maternelle se sont fortement améliorés. On ne le dira jamais assez, toute avancée dans l’éradication de la pauvreté est une victoire collective mais encore plus pour les femmes.
Mesdames et Messieurs,
La violence contre les femmes et les filles est, qu’elle qu’en soit les circonstances, une tragédie, mais cette tragédie peut et doit être arrêtée. Cela ne peut se faire de manière efficace sans données contextuelles. Conscient du fait que ces violences constituent un frein à la réalisation des objectifs de paix, de développement durable et de promotion des droits humains, mon pays a pris des mesures législatives, juridiques, institutionnelles et administratives pour y remédier. L’initiative Spotlight, conjointement avec l’Union Européenne, vient renforcer les mesures juridiques et institutionnelles ainsi que la mise en œuvre de programmes multisectoriels sur la question.
Le Niger a, entre autres, inscrit la lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles au rang de priorité nationale. Ainsi, le Niger a adopté l’ordonnance relative à la lutte contre la Traite des personnes et en particulier celle des femmes et des enfants, de même qu’une Politique et Stratégie Nationale de Prévention et de Réponse aux violences basées sur le genre, une étape décisive dans la mise en œuvre du plan d’action national sur la résolution 1325 et l’agenda, « Femmes, Paix et Sécurité ».
Nous sommes conscients de la nécessité d’une prise en charge holistique des survivantes des violences basées sur le genre dans les zones les plus touchées par la crise sécuritaire et avons, à cet effet, créé des centres dans les régions de Diffa et de Tillabéry. Les personnes en situation de déplacement forcé y sont particulièrement vulnérables car ces populations en majorité des femmes et des enfants, ont souvent moins de possibilités d’accès aux services de base – ce qui les exposent à différentes formes de violences basées sur le genre. Nous avons également mis en place des Centres de Prévention, de Promotion et de Protection de l’Enfant (CEPPP) qui, en plus font des activités préventives notamment la communication pour un changement de comportement, assurent la prise en charge de victimes.
Dans le même esprit nous sommes entrain de procéder à la mise en œuvre du plan d’action de la Stratégie Nationale de l’Autonomisation Économique de la Femme et du plan national stratégique, condition essentielle pour mettre fin au mariage des enfants.
Mesdames et Messieurs,
La reconstruction post-COVID19 pour être durable, doit être axée sur les plus vulnérables, avec des actions de proximité menées dans le cadre des programmes nationaux. Cette pandémie a démontré la nécessité de mobiliser divers acteurs dans la recherche de solutions mais aussi, dans la mise en œuvre des programmes, notamment les acteurs de la société civile, les organisations féminines, et les chefs traditionnels et religieux, qui ont joué un rôle important.
Le Niger reconnait le rôle crucial joué par les femmes, notamment au niveau local dans la prévention mais aussi dans la réponse rapide. La mise en œuvre de la politique de genre et la loi sur les quotas ont permis la nomination de femmes à des postes décisionnels importants, et cela a eu un impact positif sur la mise en œuvre des programmes de développement.
Parce que la participation effective de ces dernières renforcera l’efficacité de nos politiques publiques mais aussi les processus de paix et de développement, le Niger entend bientôt lancer un groupe d’amis des femmes du Sahel qui sera un cadre de réflexion et d’action, afin d’optimiser la contribution des Sahéliennes aux politiques nationales, régionales et globales.
Mesdames et Messieurs,
Mon pays, le Niger, réitère son engagement à combattre les violences basées sur le genre, dans toutes ses formes, notamment contre les femmes et les filles, à travers l’amélioration des opportunités pour les femmes. Dans l’annonce du Prix Mo Ibrahim pour l’excellence décerné, cette année, à SEM Mahamadou Issoufou, Président de la République du Niger, le comité a pris en compte, entre autres, le fait que le Niger figure parmi les dix pays africains qui ont le plus progressé, en matière de renforcement des opportunités socio-économiques pour les femmes.
Au Sahel, région déjà exposée aux graves effets du changement climatique, du fléau du terrorisme auxquelles sont venues s’ajouter les conséquences de la pandémie du COVID19.
C’est une situation inacceptable, que seul notre sursaut collectif et notre engagement solidaire permettront de corriger. Également, le vaccin COVID19 doit être considéré comme un bien public et non un bien soumis aux lois du marché. Aujourd’hui est le temps de l’action, une action porteuse qui permettra de protéger les femmes et les filles contre les violences basées sur le genre.
Je vous remercie pour votre attention.