
DÉCLARATION COMMUNE DES A3 + 1 DÉLIVRÉE PAR M. JERRY MATJILA REPRESENTANT PERMANENT DE L’AFRIQUE DU SUD AUPRES DES NATIONS UNIES LORS DE LA RÉUNION D’INFORMATION DU CONSEIL DE SÉCURITÉ SUR LE SITUATION EN SOMALIE
Madame la Présidente,
Je tiens à vous remercier d’avoir convoqué cette réunion importante et opportune sur la situation en Somalie. J’ai l’honneur de faire cette déclaration au nom du Niger, de l’Afrique du Sud, de la Tunisie et de Saint-Vincent-et-les-Grenadines (l’A3+1).
Cette séance d’information a pour toile de fond le fait que la Somalie s’est engagée dans une étape politique importante, à savoir la tenue des élections de 2020/21, et qu’elle a été témoin de progrès significatifs réalisés par tous les partis et dirigeants somaliens, notamment en ce qui concerne le modèle électoral, le calendrier électoral et les procédures qui guideront sa mise en œuvre.
L’A3+1 tient à remercier le Secrétaire général pour son rapport sur la situation en Somalie. Nous voudrions également remercier le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (UNSOM), M. James Swan, et le Représentant spécial du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Somalie et Chef de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), M. Francisco Madeira, pour leurs exposés. Nous félicitons chacun d’entre eux pour leur engagement et leurs efforts constants en vue de soutenir la stabilisation et la poursuite du processus de construction de l’État en Somalie.
Notre déclaration se concentrera sur quatre questions et développements importants en Somalie, à savoir les développements politiques, qui comprennent les préparatifs des élections, la sécurité et la situation humanitaire ainsi que le rôle des missions des Nations Unies et de l’Union africaine.
Madame la Présidente,
Sur les développements politiques
L’A3+1 félicite le gouvernement fédéral de Somalie et les États membres fédéraux pour les importantes consultations et les accords conclus récemment, qui constituent des étapes significatives vers la réalisation d’un large consensus politique sur des questions clés, notamment la tenue des élections générales de 2021.
À cette fin, nous nous félicitons de l’accord conclu par les dirigeants somaliens sur le modèle et le calendrier électoraux qui garantirait la tenue des élections générales comme prévu à la fin de 2020 et au début de 2021. Nous sommes encouragés par le dévoilement du projet de plan national de sécurité des élections. Nous estimons que la tenue d’élections réussies et sûres en Somalie nécessite la pleine participation, le partage d’informations et la coordination entre la police, l’armée, l’AMISOM et les autres partenaires internationaux. Cela montrera encore une fois que la Somalie fait des progrès notables pour répondre à ses préoccupations en matière de sécurité et pour soutenir les efforts de propagande et de déstabilisation des groupes armés.
De même, nous applaudissons tous les acteurs politiques somaliens, y compris les organisations de la société civile, pour leur engagement en faveur de la consolidation de la démocratie, en particulier pour avoir veillé à la tenue d’élections crédibles en temps utile, pour avoir garanti le quota de 30 % de représentation féminine au Parlement et pour l’impératif de protéger la souveraineté, l’indépendance, la stabilité et l’unité de la Somalie. Nous demandons instamment à toutes les parties prenantes en Somalie de maintenir cet esprit d’appropriation nationale et de coopération à tous les niveaux, afin de parvenir à un large accord sur des questions essentielles telles que la réalisation de leur aspiration à faire du pays un pays où les élections se tiendront à l’avenir selon le principe « une personne, une voix », la conclusion de la rédaction de la constitution fédérale, les dispositions en matière de sécurité et le partage du pouvoir, entre autres.
À cet égard, l’A3 +1 félicite S.E. Mohammed Hussein Roble pour son élection au poste de Premier ministre de la Somalie et pour son nouveau cabinet inclusif et représentatif. Nous espérons que le nouveau gouvernement continuera à s’appuyer sur les avancées significatives réalisées par la Somalie ces dernières années en matière de priorités politiques, économiques et de sécurité.
Madame la Présidente,
Sur la situation en matière de sécurité
L’A3+1 reste préoccupé par la situation sécuritaire toujours instable en Somalie. Nous condamnons fermement toutes les attaques, en particulier celles menées au moyen d’engins explosifs improvisés (IED) et de véhicules suicide (VBIED), par Al-Shabaab contre les civils somaliens, les forces de sécurité, l’AMISOM, les Nations unies et la communauté internationale, y compris contre les infrastructures essentielles. Nous rendons ainsi hommage au sacrifice ultime de l’AMISOM et des forces de sécurité somaliennes dans leur quête pour apporter la paix, la stabilité et le développement en Somalie. Nous soulignons que les responsables de ces crimes odieux ne doivent pas rester impunis.
Nous réitérons nos appels précédents invitant instamment le gouvernement fédéral de Somalie, avec le soutien des Nations unies, de l’AMISOM, de l’UNSOM et des partenaires internationaux, à continuer de créer, de former et de doter en ressources des forces nationales somaliennes compétentes, efficaces et performantes qui, à terme, assumeront les responsabilités en matière de sécurité conformément au plan de transition somalien révisé et à l’architecture nationale de sécurité. La récente décision de ce Conseil d’assouplir encore l’embargo sur les armes en Somalie contribuera à renforcer les capacités et les moyens des forces de sécurité somaliennes.
Madame la Présidente,
Nous condamnons fermement les incidents signalés de victimes civiles, les violences sexuelles liées au conflit, qui continuent de toucher de manière disproportionnée les femmes et les filles, les graves violations à l’encontre des enfants, notamment les enlèvements, le recrutement et l’utilisation, les meurtres et les mutilations, qui ont été enregistrés au cours de la période considérée. Des mesures plus efficaces doivent être prises pour prévenir ces violations, conformément au droit international des droits de l’homme et au droit international humanitaire. Nous soutenons donc les appels lancés pour que tous les auteurs de ces crimes soient identifiés et tenus pour responsables.
Madame la Présidente,
Sur la situation humanitaire
La Somalie a été touchée par la triple menace de la pandémie COVID-19, des criquets pèlerins et des inondations. Ces défis ont aggravé la crise humanitaire en Somalie. COVID-19, en particulier, a exacerbé les vulnérabilités préexistantes, perturbé les gains socio-économiques et affecté les moyens de subsistance des Somaliens ordinaires. Nous saluons les actions des partenaires humanitaires pour l’élargissement de leur soutien aux autorités somaliennes afin de faire face à l’impact de COVID-19.
L’A3+1 note que l’impact négatif des inondations dues au changement climatique est resté très répandu en Somalie au cours de la période considérée. Nous craignons que cette situation ne continue d’exacerber les déplacements de population, l’insécurité alimentaire, l’apparition de maladies hydriques, et de nuire aux moyens de subsistance des personnes les plus vulnérables dans tout le pays. À cet égard, la Somalie a besoin du soutien continu de la communauté internationale et des partenaires humanitaires pour atténuer l’impact de cette triple menace. Nous soutenons l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur d’un financement supplémentaire qui est nécessaire de toute urgence pour continuer à fournir l’aide humanitaire.
Nous regrettons que la situation sécuritaire demeure une contrainte majeure pour les opérations humanitaires. Nous condamnons fermement les incidents violents enregistrés, même s’ils se poursuivent, contre les opérations et les fournisseurs d’aide humanitaire, y compris les incidents enregistrés qui ont conduit au meurtre, aux enlèvements et, dans certains cas, à la détention de travailleurs humanitaires. En outre, nous prenons note des attaques contre les journalistes et des violations de la liberté d’expression mentionnées dans le rapport du Secrétaire général et nous encourageons les autorités somaliennes à prendre les mesures nécessaires pour traiter ces questions.
En tant qu’A3+1, nous reconnaissons toutefois les défis socio-économiques critiques auxquels la Somalie est confrontée et qui ont eu un impact négatif sur l’expansion de certaines activités de sécurité, y compris la libération d’un plus grand nombre de zones. Malgré cela, nous félicitons la Somalie pour les progrès qu’elle a accomplis pour satisfaire à tous les critères structurels dans le cadre de la première mission d’examen du Fonds monétaire international (FMI) au titre de la facilité de crédit élargie. Nous nous félicitons en outre de l’opération supplémentaire de financement de la politique de développement de la Banque mondiale visant à soutenir la triple crise de la pandémie COVID-19, des criquets pèlerins et des inondations. Ces mesures de soutien ont permis de garantir que l’économie somalienne reste résistante face aux défis actuels.
Madame la Présidente,
Sur le rôle des missions de l’ONU et de l’UA
Nous saluons l’engagement soutenu des Nations Unies par l’intermédiaire de l’UNSOM, du Bureau d’appui des Nations Unies pour la Somalie (UNSOS), de l’AMISOM et de l’UNMAS, ainsi que celui du gouvernement fédéral, des États membres fédéraux de la Somalie et des partenaires internationaux pour leurs efforts et les progrès constants qu’ils ont accomplis pour stabiliser la Somalie, y renforcer le fédéralisme et y construire un État.
Nous sommes préoccupés par le fait que les fonds d’affectation spéciale des Nations unies destinés à soutenir l’AMISOM et les forces de sécurité somaliennes sont sérieusement sous-financés. Cela aura un impact négatif sur l’AMISOM et les forces de sécurité somaliennes en ce qui concerne la fourniture par le Bureau d’appui des Nations Unies pour la Somalie d’un soutien logistique, d’une formation, d’un encadrement et d’équipements essentiels pour contrer la menace des engins explosifs improvisés. Nous appelons à plus de contributions à ces fonds d’affectation spéciale car le manque de financement pourrait éroder les gains réalisés par la Somalie avec le soutien des missions des Nations Unies et de l’Union africaine.
Nous demandons instamment la poursuite et le renforcement des relations de travail entre l’AMISOM et l’UNSOM afin d’aider la Somalie à prendre en charge ses propres problèmes de sécurité, comme le prévoit le plan de transition somalien. Nous attendons avec intérêt la finalisation du plan de transition somalien actualisé, qui guidera le transfert des responsabilités en matière de sécurité de l’AMISOM aux forces de sécurité somaliennes. Nous réaffirmons toutefois que le retrait et la sortie éventuelle de l’AMISOM de la Somalie devraient être subordonnés à des conditions qui dépendent de la situation sécuritaire dans le pays.
L’A3+1 soutient le maintien de la présence de l’AMISOM et de l’UNSOM en Somalie, car la situation actuelle en matière de sécurité reste instable et se caractérise par de fréquents attentats terroristes. En outre, nous sommes d’accord avec les observations du Secrétaire général selon lesquelles une transition réussie dépend de la mise en place d’institutions adéquates en Somalie, de la génération de forces et du renforcement des capacités de contrôle, de gestion et de maintien des services de sécurité somaliens, notamment par un soutien financier, opérationnel et logistique. Des efforts supplémentaires doivent être déployés pour atteindre ces objectifs.
Nous reconnaissons également la pertinence de la conduite d’évaluations et d’examens réguliers pour l’aide fournie à la Somalie par les Nations Unies et l’Union africaine. Nous souhaitons souligner qu’il est essentiel de solliciter et de prendre en compte les points de vue des principales parties prenantes concernées sur le continent, notamment l’Union africaine, l’IGAD et les PCC/PCC, sur l’avenir du soutien international à la Somalie au-delà de 2021. Il ne peut y avoir de progrès réel en Somalie, ou ailleurs sur le continent africain, sans la participation et la contribution actives de ses peuples dans la recherche de solutions aux problèmes africains, et sans faire taire les armes.
Pour conclure, Madame la Présidente, nous apprécions les efforts continus de la communauté régionale, sous-régionale et internationale, y compris l’ONU, l’UA, l’UE et l’IGAD, entre autres, pour apporter la stabilité politique aux Somaliens et à la région, afin de soutenir les processus de paix, de sécurité et de consolidation de la paix menés et contrôlés par les Somaliens.
Je vous remercie