Déclaration du RSSG au Conseil de sécurité sur la SOMALIE

Déclaration du RSSG au Conseil de sécurité sur la SOMALIE

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil,

Je vous remercie de me donner à nouveau l’occasion de faire le point sur la situation en Somalie.

Je suis particulièrement heureux de m’adresser à vous aujourd’hui en compagnie du Premier ministre somalien, Son Excellence Mohamed Hussein Roble, ainsi que de la fondatrice et présidente du mouvement somalien pour l’égalité des sexes, Mme Zainab Hassan, et du représentant spécial du président de la Commission de l’Union africaine, mon cher ami et collègue, l’ambassadeur Francisco Madeira.

Nous nous réunissons alors que la Somalie est confrontée à des décisions cruciales : un processus électoral pour choisir le parlement et le président dans les prochains mois ; une transition sécuritaire afin que les Somaliens puissent assumer la responsabilité principale de la sécurité d’ici la fin 2021 ; et des priorités urgentes pour la réponse humanitaire et les réformes économiques.

Madame la Présidente,

Lorsque je me suis adressé à ce Conseil pour la dernière fois en août, les dirigeants somaliens se réunissaient pour convenir d’un plan pour les élections de 2020/21. En septembre, ils sont parvenus à un consensus sur un modèle électoral indirect, mettant fin à une impasse politique de deux ans entre le gouvernement fédéral et les États membres fédéraux.

Le modèle de vote convenu n’a malheureusement pas satisfait à l’exigence constitutionnelle d’élection du parlement au suffrage universel direct.  Pourtant, l’accord reflétait un large consensus politique somalien et un sentiment d’appropriation.  Outre le soutien du président et des dirigeants des États membres fédéraux, le modèle indirect a également été approuvé par d’autres acteurs somaliens clés, notamment les partis politiques et la société civile, et a été ratifié par le Parlement fédéral.

À l’avenir, ce large consensus politique doit maintenant être préservé et même approfondi au fur et à mesure de la mise en œuvre de l’accord.  Le processus convenu doit être mené de manière équitable, transparente, largement acceptée et pacifique.  Et il doit être plus participatif et inclusif qu’il ne l’était il y a quatre ans. Nous nous félicitons de l’accord des dirigeants politiques visant à garantir le quota de 30 % de femmes pour les sièges au Parlement et nous demandons instamment que cet engagement soit pleinement respecté.

Le calendrier électoral prévoit la sélection des membres des deux chambres du Parlement fédéral d’ici la fin décembre, et l’élection du président fédéral par le nouveau Parlement en février 2021.  Les nominations aux organes de gestion des élections ont pris plusieurs semaines de retard et restent l’objet d’une certaine controverse.  La finalisation du plan de sécurité électorale est également attendue, afin de garantir que les élections soient aussi sûres que possible et de minimiser le risque qu’Al Shabaab perturbe ou influence le processus.

Pour soutenir ces efforts menés par les Somaliens, l’UNSOM prévoit de contribuer à la mise en œuvre de l’accord électoral, dans le cadre de son mandat et en collaboration avec le PNUD, le Bureau d’appui des Nations unies pour la Somalie et les partenaires internationaux. Nous poursuivrons également nos efforts en vue de la tenue d’élections au suffrage universel à l’avenir.  À cette fin, nous demandons instamment aux dirigeants somaliens d’élaborer de manière consensuelle une feuille de route assortie d’un calendrier et de critères précis afin de garantir la tenue d’élections à un seul vote en 2024/25.

Madame la Présidente,

En septembre, le président Mohamed Abdullahi Farmajo a nommé le premier ministre Mohamed Hussein Robleh, qui a ensuite nommé son cabinet. Le nouveau gouvernement a une tâche difficile devant lui, non seulement pour guider le pays dans le processus électoral, mais aussi pour poursuivre le programme de réformes dans tous les domaines de la politique, de la sécurité et de l’économie. Les Nations unies en Somalie sont prêtes à aider le gouvernement à faire avancer les priorités nationales.

Je félicite les dirigeants somaliens pour leur esprit de compromis qui a permis de parvenir à un accord entre le gouvernement fédéral et les États membres fédéraux. Cet esprit doit maintenant être maintenu. Au-delà des élections, nous demandons également que de nouveaux progrès soient réalisés grâce à un consensus sur d’autres réformes démocratiques, notamment le processus de révision constitutionnelle et la création de la Commission des services judiciaires, de la Commission des droits de l’homme et de la Cour constitutionnelle, à titre d’exemples.

Le dialogue politique est également essentiel pour traiter d’autres priorités urgentes, notamment les opérations contre Al Shabaab, les réformes économiques et sécuritaires, et la collaboration pour relever les multiples défis humanitaires auxquels le pays est confronté.  Nous encourageons les acteurs politiques à institutionnaliser ce dialogue entre les dirigeants, par exemple par le biais du Forum consultatif national nouvellement créé.

Pour promouvoir ce dialogue, j’ai récemment entamé une série de visites dans les capitales des États membres fédéraux, auxquelles se sont joints le CSRR de Madère et des représentants de l’Union européenne et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement.  Je crois savoir que le Premier ministre Roble a également entamé une tournée des régions afin d’engager le dialogue avec les chefs d’État, et je me félicite de cette initiative.

Madame la Présidente,

La situation sécuritaire en Somalie reste préoccupante, avec des attaques persistantes d’Al Shabab, qui reste la principale menace pour la sécurité du pays.  La poursuite des efforts pour protéger le peuple somalien et la dégradation des capacités d’Al Shabab doit être l’objectif principal des forces de sécurité nationales, de l’AMISOM et des autres partenaires de sécurité – en particulier, alors que nous entrons dans la période électorale sensible.

L’année prochaine sera une année de transition au cours de laquelle la Somalie assumera la responsabilité principale des questions de sécurité. Cela nécessite un accord sur une vision stratégique pour la sécurité de la Somalie impliquant tous les acteurs de la sécurité.  Le gouvernement fédéral a déjà commencé ce travail en élaborant un plan de transition actualisé pour la Somalie.  Il est crucial que ce plan aborde de nombreux défis de longue date – notamment la nécessité d’avoir des objectifs opérationnels réalistes, des plans crédibles pour la génération de forces et des structures de coordination claires.   Le plan de transition actualisé servira de base pour les discussions à venir dans les mois à venir afin d’orienter le rôle des forces de sécurité somaliennes ainsi que des acteurs extérieurs, notamment l’AMISOM, les Nations unies et les partenaires bilatéraux en matière de sécurité.  Je me félicite du plan annoncé par le Premier ministre de convoquer début décembre le comité exécutif de l’approche globale de la sécurité, également connu sous le nom de comité de sécurité et de justice.

Je rends hommage aux forces de sécurité somaliennes et à la mission de l’Union africaine en Somalie pour leur poursuite résolue et courageuse de la paix et de la stabilité en Somalie. Nous saluons également le soutien et l’engagement constants des États membres en faveur du développement de l’État de droit et du secteur de la sécurité en Somalie. C’est grâce à des gains collectifs dans le domaine de la sécurité qu’un espace est créé pour le processus politique, la gouvernance et le renforcement des institutions.

Les droits de l’homme et la justice restent au centre de notre travail pour le développement de la Somalie. À l’approche des élections, je souligne mes précédents appels à la protection de l’espace politique, à la tolérance des opinions divergentes, au respect de la liberté d’expression et d’association, et à la liberté des médias.

Je réitère mes préoccupations face à la récente augmentation des cas de violence sexuelle contre les femmes et les jeunes filles, et face à la législation régressive relative aux droits et libertés sexuels qui est entrée dans le processus parlementaire tant à Mogadiscio qu’à Hargeisa, et qui est contraire aux normes internationales.

Madame la Présidente,

Les besoins humanitaires restent aigus. La Somalie a été durement touchée par le triple choc de COVID-19, des inondations et des invasions de criquets. Les tendances nationales des cas de COVID-19 sont globalement favorables, mais nous devons rester vigilants.  Je félicite à nouveau les autorités somaliennes pour leur réaction rapide à l’épidémie de COVID-19 et je remercie les professionnels de la santé somaliens qui sont en première ligne pour vaincre la pandémie.

Je me félicite du nouveau cadre quinquennal de coopération pour le développement durable entre le gouvernement fédéral somalien et les Nations unies, qui guidera le soutien des Nations unies aux priorités de développement appartenant aux Somaliens et dirigées par eux. Ce cadre s’aligne sur le neuvième plan de développement national de la Somalie.  Nous demandons instamment au gouvernement de rester fidèle à son engagement en faveur du programme de réforme afin de progresser sur les critères de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés jusqu’au point d’achèvement.  Nous attendons avec intérêt le prochain Forum de partenariat pour la Somalie, annoncé par le Premier ministre pour le début du mois de décembre, afin de faire le point sur les progrès réalisés depuis l’année dernière et de convenir des priorités pour l’avenir.

Madame la Présidente,

En conclusion, permettez-moi d’assurer le Conseil de l’engagement continu de l’UNSOM avec les parties prenantes somaliennes pour promouvoir la coopération politique dans l’intérêt du pays.  Nos bons offices visent à favoriser les niveaux d’inclusion et de consensus les plus larges possibles.

Alors que le pays se concentre sur le processus électoral, les Nations unies en Somalie continueront à faire pression pour la participation des groupes historiquement sous-représentés, parmi lesquels les femmes, les jeunes et les communautés marginalisées.  Tous ces groupes ont beaucoup à apporter à la paix, à la stabilité et au développement de leur pays.

Les mois à venir vont déterminer le cours de la Somalie pour les prochaines années.  En ce moment critique, je suis reconnaissant au Conseil de son soutien alors que notre équipe des Nations Unies s’efforce d’aider les dirigeants et le peuple somaliens à réaliser les priorités nationales.  

Je vous remercie.