Allocution de M. Abdou ABARRY, Représentant Permanent du Niger auprès des Nations Unies au briefing du Conseil de Sécurité sur la situation en Libye

Allocution de M. Abdou ABARRY, Représentant Permanent du Niger auprès des Nations Unies au briefing du Conseil de Sécurité sur la situation en Libye

Je voudrais exprimer notre appréciation à Mme Stéphanie Williams, Représentante Spéciale par intérim du Secrétaire général en Libye, et à M. Günter Sautter, Président du Comité des sanctions (1970), et Représentant Permanent adjoint de l’Allemagne, pour la qualité de leurs exposés et pour la perspective qu’ils viennent de nous donner de la situation actuelle en Libye.

Voisin de la Libye, le Niger est sensible, à tout ce qui, en bien ou en mal touche ce pays, et c’est à ce titre que nous avons accueilli favorablement, l’annonce faite par les Présidents du Conseil Présidentiel, M. Fayez Al Serraj, et de la Chambre des Représentants, M. Aguila Saleh, en faveur d’un cessez-le-feu immédiat.  

Très peu de bonnes nouvelles nous sont parvenues de la Libye, ces derniers temps. C’est pourquoi, celle de l’annonce de ce cessez le feu devrait nous pousser à dire que malgré le chaos actuel, des signes d’espoirs existent.

En effet, lorsque les Libyens arrivent à se parler, ils peuvent créer un espace propice à la paix et la réconciliation dans leur pays.

Dans le même ordre d’idées, la perspective de l’organisation d’élections d’ici Mars 2021, devrait être saluée et encouragée.

Il est évident, que la vraie légitimé s’obtient par la voie des urnes et non par celle des armes, transférées en grandes quantités en Libye, au gré d’intérêts contraires aux aspirations de paix, d’une population trop longtemps exposée aux actes de haine et de violence.

Les souffrances des populations libyennes sont malheureusement exacerbées par le contexte de la pandémie du COVID-19, dont le nombre des cas a connu une flambée ce dernier temps.  

Depuis bientôt une décennie, la situation en Libye n’a cessé de se détériorer. Après plus de dix ans de guerre, les libyens n’ont pas connu la démocratie qui leur avait été promise et à laquelle ils pouvaient légitimement aspirer. Plus grave encore, ils ont perdu la paix et la sécurité et sont aujourd’hui menacés de perdre l’unité de leur pays.

Nos appels répétés et nos bonnes intentions, sont hélas contrariées par le refus de plusieurs acteurs de respecter l’embargo sur les armes, auquel ils ont pourtant librement souscrit à Berlin. La Libye et son peuple ont payé le prix fort, ses femmes et enfants sont tués par milliers, ses ressources sont pillées et ses infrastructures détruites, y compris ses écoles et ses hôpitaux, malgré la pandémie du COVID 19. 

Malgré ses efforts, le Secrétaire Général des Nations Unies n’arrive pas à désigner un Représentant Spécial, pourtant si nécessaire pour relancer la seule formule de sortie de crise qui vaille, celle du dialogue politique et de réconciliation. Il est plus qu’urgent, qu’un Représentant Spéciale du Secrétaire Général soit nommé, de façon à ce qu’il conforte la dynamique de la recherche d’une solution politique à la crise libyenne.

C’est le lieu pour ma délégation de réitérer l’importance du rôle que doivent continuer de jouer le Conseil de Sécurité, l’Union Africaine, la Ligue des États Arabes, l’Union Européenne, et tous les autres acteurs concernés, pour stopper la dérive actuelle, et aider la Libye à redevenir ce pays de paix, de stabilité et de prospérité.

Dans cette optique, le Niger se félicite des efforts déployés par le Comité de Haut Niveau, ainsi que par le Groupe de Contact de l’Union Africaine sur la Libye.

Nous saluons également, le rôle positif joué par la Mission d’Appui des Nations Unies en Libye (MANUL) qui, malgré le contexte difficile, à travers ces bons offices et ses appuis multiformes, s’attèle à rapprocher les belligérants, conformément à son mandat. C’est pourquoi sous sommes favorables à une prolongation du mandat de ladite Mission pour une nouvelle période de 12 mois.

Le Niger salue également, le rôle joué par la Mission IRINI dans le cadre du contrôle de l’embargo sur les armes, conformément aux résolutions 2473 et 2292, tout en estimant qu’une attention particulière devrait être accordée à la situation des migrants africains se trouvant dans des camps de détention, et qui sont souvent tués lors des bombardements ou sinon utilisés comme des combattants ou des boucliers humains par les différents groupes armés dans ce pays.

De plus, le Niger est d’avis avec le Secrétaire Général, sur la nécessité de revoir la politique de débarquement en terre libyenne, des migrants et des réfugiés interceptés en mer. La volatilité de la situation sécuritaire et la vulnérabilité dans laquelle ils se retrouvent, une fois débarqués, devrait nous interpeler.   

Sur le plan économique, les graves conséquences du conflit ont engendré une détérioration des conditions de vie des populations libyennes et réduit la capacité des autorités à subvenir aux besoins sociaux de base de leurs concitoyens.

C’est pourquoi, nous saluons l’annonce de la levée du blocus pétrolier sur l’ensemble du territoire, car la relance de la production générera les ressources dont la Libye a besoin pour faire face aux besoins que j’évoquais tantôt.

Pour conclure, aujourd’hui plus que jamais, la Libye a besoin de réconciliation, elle a besoin du génie de tous ses fils, sans exclusive aucune, pour bâtir à nouveau cette nation forte et digne qu’elle a toujours été !

Si nous sommes attachés au triomphe de la justice, nous sommes encore plus désireux de voir la paix revenir en Libye, car sans cette paix, il n’y aura pas de justice. En effet, aux crimes commis hier, viendront s’ajouter ceux d’aujourd’hui, encore plus graves et plus inacceptables.
La Libye a plus que jamais besoin de notre solidarité, c’est le moment d’agir.  

Je vous remercie.